Dans votre film «CHAMBOULTOUT», vous jouez un homme aveugle. Un fameux défi, non ?
Vous savez, ce que j’aime, c’est déjà de toujours surprendre le réalisateur même s’il contrôle son image et son cadre. J’aime lui donner quelque chose en plus. Ensuite, ce qui me plait dans le cinéma, c’est qu’il faut se réinventer tout le temps et repousser ses limites. Et enfin, j’aime le drame et les comédies dans les personnages. Les défauts et les failles des gens sont les choses les plus intéressantes à jouer et à valoriser à l’écran. Dans le film d’Eric Lavaine, je joue un personnage sympathique nommé Fréderic qui a eu un accident. Il est percuté par un scooter. A partir de là, il perd la vue ! Sa vie est chamboulée comme celle de sa femme. Il devient un homme sans filtre et imprévisible. C’est un beau défi qui me tentait.
Selon vous, qu’est-ce qui était le plus difficile à jouer ? S’emparer de cet handicap ou de jouer le côté « sans filtre » de Frédéric ?
Une personne aveugle est toujours dans la crainte d’un obstacle. C’est terriblement angoissant chaque seconde. Par contre, un homme sans filtre est souvent impulsif et a tendance à agir sans réfléchir. La grande difficulté c’est que ces deux défaillances sont antinomiques.
Qu’est-ce qui vous intéressait dans ce personnage ?
Son humanité mais aussi son humour. Il y a en lui une certaine comédie malgré son parcours chaotique. Eric que je connais depuis longtemps, m’avait proposé d’autres rôles mais que j’ai toujours décliné. Pourquoi ? Car j’aime le challenge. Avec le film « CHAMBOULTOUT », il m’a téléphoné en me précisant qu’il avait vraiment un rôle pour moi et que c’était un vrai défi. Nous en avons parlé ensemble et l’idée d’interpréter le personnage de Frédéric me plaisait.
Est-ce un long métrage basé sur une histoire vraie ?
Oui, effectivement. Vous savez, j’aime prendre des rôles risqués. J’aime quand je ne sais pas comment je vais terminer la journée. J’aime quand je ne sais pas comment je vais le faire. Et donc je suis dans une inquiétude totale. Frédéric que j’incarne dans le film a perdu la vue mais il a gardé toute la mémoire de sa vie passée. Il a toujours cette impression de travailler au même poste dans la finance. Frédéric est aussi un homme sans filtre qui met mal à l’aise certaines de ses camarades.
Comment vous êtes-vous imprégné de votre personnage aveugle ?
Il faut se mettre dans un état proche de l’hypnose. Il faut basculer sur d’autres références et développer ses autres sens afin de découvrir les choses sans savoir où elles sont. C’était un vrai challenge à relever. Je me répète mais c’est ça que j’aime.
Et comment avez-vous vécu cette expérience de vivre dans le noir ?
Beaucoup de gens pensent que j’ai joué les yeux fermés mais ce n’est pas le cas. Il faut être capable de transposer une image. Il faut la regarder constamment, continuer à jouer et être capable de parler aux autres tout en gardant la concentration sur l’image. Je vous avoue bien volontiers que c’est très fatigant mais l’expérience est unique.
Au fait, comment avez-vous rencontré Eric Lavaine ?
Avec Eric, c’est une vieille histoire, on se connaît depuis longtemps. Lorsqu’il a commencé à réaliser des films, il m’a proposé plusieurs rôles mais j’ai toujours décliné car je n’y voyais pas de challenge. Après tous ces râteaux, il m’a rappelé en me disant que si je refusais d’incarner Frédéric dans CHAMBOULTOUT , il le prendrait vraiment mal car, cette fois, il y avait un vrai défi à relever. J’ai toujours aimé les sujets qu’il abordait et l’idée d’interpréter Frédéric me plaisait beaucoup.
Votre personnage Fréderic voit sa vie basculer du jour au lendemain. Avez-vous déjà eu cette crainte ?
Oui, surtout que je fais beaucoup de sports extrêmes. Impossible de ne pas y penser. Mais pour en revenir au titre du film « CHAMBOULTOUT», c’est aussi l’histoire d’une femme qui est chamboulée deux fois dans sa vie. La première, par l’accident de son mari que j’interprète. La seconde fois c’est parce qu’elle a écrit un livre dans lequel elle raconte son histoire. Tous ses amis qui se sont retrouvés pendant les vacances se sont mis à lire ce livre et se sont rendu compte qu’elle les décrivait d’une certaine manière sans avoir mis les bons noms.
Qu’est-ce qui vous a touché en voyant le film ?
L’humanité qui s’en dégage, la subtilité du propos et la finesse de jeu. Je m’attendais à une comédie à l’humour un peu forcé et j’ai découvert un film à la fois très drôle et doté d’une grande pudeur. C’est, je crois, ce qui charme le spectateur. Tout comme le plaisir de rire des choses dramatiques. La société nous l’interdit de plus en plus mais c’est bon de se rappeler qu’on peut s’accorder ce droit.
Vous êtes pilote d’avion ! Devenir pilote était un rêve de gosse ?
Oui. J’ai toujours aimé les avions. Et ceci depuis ma plus tendre enfance. Mon idée a mûri. J’ai mis un an pour devenir pilote. J’ai appris à piloter dans différents climats afin de voler en en toute sécurité. Maintenant, cela fait quelques années que j’ai la licence, et si je peux réaliser des rêves d’enfants lors de mes moments hors tournage…je n’hésite jamais.
Cette passion pour l’aviation, est-ce une manière d’échapper à la folie du cinéma ?
C’est le seul moment où je suis maître de mon destin. Les choix que je fais à ce moment-là sont en prise direct avec ce que je suis. Si je fais une erreur, je la paie immédiatement comme avec le Kitesurf. Ces deux disciplines n’engagent que ma décision. Alors que dans un film, je m’engage à servir un metteur en scène mais aussi toutes les autres personnes qui participent au film. Je ne suis pas maître de ce que je dois faire.
Quelles sont vos autres passions en dehors de votre métier d’acteur ?
C’est d’aller vers l’autre, célébrer l’amitié ! J’ai besoin de ce lien.
Finalement, votre vie est bien remplie en dehors des tournages. Le sport serait-il devenu plus important que le cinéma ?
Avant, c’était la fête et le cinéma. Aujourd’hui, c’est le sport et le cinéma. Avec le sport, j’ai beaucoup de plaisirs, de joie, de bonheur et des belles rencontres. D’ailleurs, je lance un petit message à ceux qui sont encore dans la fête et qui ont peur de passer au sport : ils ne doivent pas avoir peur. Il y a beaucoup de plaisir à faire du sport.
Le cinéma c’est le même scénario que le sport ! Qu’importe la qualité de jeu… Il faut rapporter.
Il est vrai que de nos jours, l’industrie du cinéma est très difficile Si vous vous plantez consécutivement dans deux films, vous risquez de le payer cash.
Croyez-moi, il est très difficile de porter un film sur ses épaules. Le cinéma c’est une jungle comme dans le sport. Il faut se donner à fond pour donner toutes les chances aux films pour que le public soit conquis.
Vous œuvrez souvent dans l’ombre pour tendre la main à des enfants victimes du destin. Est-ce quelque chose de vital pour vous ?
Il est important d’aller vers l’autre, de faire rêver et de faire briller les yeux des enfants. J’ai souvent œuvré dans l’ombre parce que je préfère être dans l’action et loin des caméras.
Quel message avez-vous envie de transmettre aux gens qui sont toujours dans cette vision assez sombre de la vie? Sans partage ?
Justement qu’il faut aller vers ceux qui sont malades. Aller voir leur combat de tous les jours. De leur tendre la main et d’aider ceux qui sont touchés par la maladie. Ils seraient mille fois plus heureux ! On peut aider de plusieurs façons. Que ce soit en faisant un don, ce qui est important mais aussi en donnant du temps comme les bénévoles qui aident des associations. J’ai un ami qui n’était pas bien. Il ne savait plus quoi faire. Je lui ai dit « Si tu ne sais pas quoi faire de ta vie : donne-la ! ». Etre au service des autres qui sont malades va t’aider à prendre conscience qu’aider l’autre est important et qu’il faut arrêter de se plaindre !
Selon vous, le succès est-il souvent un miroir qui ne reflète pas la vérité ?
Oui, et c’est là qu’on voit à quel point le succès peut être une façade. Les gens se disent «Cet homme a tout : la gloire, l’argent, le bonheur. Sa vie est lumineuse et merveilleuse». Alors que derrière, il y a parfois une vraie grande détresse. Des démons qui vous rongent. Ou encore, une grande fragilité qui peut vite vous menez vers le bas. La réussite ne suffit pas à combler les failles. Aujourd’hui, avec les réseaux sociaux, on devient vite la proie d’individus qui vous veulent du mal.
C’est aussi …
JOSÉ GARCIA